Lac de Pradeilles (Pyrénées Orientales)

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Ce blog comme une promenade entre amis… On pourra donc lire ou écrire, admirer la nature, ramasser des cèpes ou des morilles , pêcher à la mouche, jouer au poker, parler médecine, littérature, actualité,ou même de tout et de rien comme le font des amis en fin d'une belle journée de randonnée...

dimanche 15 mai 2011

Sexe aux logis

         

       Entre un chef islamiste radical raide comme l'injustice chez qui on aurait trouvé des cassettes pornographiques (ici) et l'arrestation d'un probable candidat à la présidence de la république qui aurait cherché à obtenir par la force une faveur ancillaire (), l'actualité récente prouve si besoin était que le théâtre de boulevard a toujours de beaux jours devant lui…

             Mais on va voir ce type de pièce de théâtre pour se détendre, ici c'est moins drôle…

             Si on peut comprendre, en soulignant la tartufferie, le passe temps d'un homme, même commandeur de croyants, qui, enfermé dans son réduit, n'avait après tout que 3 femmes (!), qui plus est sans doute en permanence dissimulées sous d'épaisses étoffes, et comme boulot de tristes projets souterrains d'attentats, on se doit d'espérer que dans l'autre affaire, concernant un homme libre, puissant et à l'évidence susceptible de séduire beaucoup plus que 3 belles, il s'agisse d'un coup monté monstrueux, ou alors…

             Ou alors,… rien, le sexe a depuis toujours le talent de détourner les hommes des voies qu'ils prétendent emprunter je vais donc me contenter d'essayer de vous faire rire avec un modeste exemple dans cette petite nouvelle, la seule d'ailleurs qui m'avait fait l'honneur d'avoir été aussi traduite en anglais…



                                                SPERM-0-GRAM-ME


             Après deux ans d'efforts sincères, Charlotte et Raymond durent se rendre à l'évidence: pas moyen d'avoir un bébé.  Même en s'appliquant tous les jours, et plusieurs fois par jour. Même à contrario en s'imposant de longues périodes d'abstinence qui, hélas, ne transformaient pas l'exception en paroxysme fécond...
                Pire, depuis peu, depuis qu'elle consultait, ils besognaient sur commande, mettaient l'amour en courbes, prenaient la température du plaisir.
                  Raymond glissait doucement vers l'indifférence.  Il n'était plus très sûr de son désir.  Il passait de plus en plus de temps dans la mécanique et la carrosserie: chez lui, le scientifique endeuillait le spontané.
                 Charlotte, beaucoup plus résolue, refusait de baisser les bras, et levait les jambes à heures fixes, attentive au moindre signal d’ovulation.

Malheureusement, chaque mois, l'échec s'inscrivait en rouge.

            Raymond, rétif et soupçonneux, finit par accéder aux requêtes conjuguées de Charlotte et du gynécologue:

- Un quoi ? demanda-t-il incrédule...

- Un sperm-o-gram-me ! expliqua l'homme de l'art.

              La science, sans peur du ridicule, analysait le foutre, dénombrait les candidats, en disséquait les qualités.  Ainsi Raymond sceptique apprit  qu'ils étaient des millions - des millions !- par gouttelette, que nombre d'entre eux étaient monstrueux,  les autres se comportant comme de vulgaires têtards à l'intérieur de ce qu'il n'allait tout de même pas cesser d'appeler des roustons, nom d'une pipe !

Il plia l'ordonnance en quatre, la glissa dans son bleu de travail et n'y pensa plus.

Tous les soirs, Charlotte revenait à la charge:

- As-tu fait l'analyse ?

             Un jour de canicule, il se résigna, abandonnant au soleil les carcasses de métal bouillant, et se rendit au laboratoire.  Au comptoir un jeune homme en blanc prit sans un mot l'ordonnance et lui tendit l'éprouvette, en montrant les toilettes.

Raymond fit signe qu'il trouvait l'explication insuffisante.
L'homme chuchota qu'il ne connaissait pas d'autre moyen.

          Choqué, mais stoÏque, Raymond entra dans la piécette.  Pendant de longues minutes, il essaya en vain d'éliminer le cambouis qui entartrait ses ongles et ses doigts profondément.  Puis il s'appliqua, en fermant les yeux pour ne pas voir cette main noire de poils et de suie.
En pure perte.  Il dit au laboratoire qu'il reviendrait un autre jour, oui, c'est çà, un autre jour...

           Le jour fut autre, mais pas le résultat.  C'était une affaire plus sérieuse qu'on l'aurait crû.  Malgré cette fois des mains d'écrivain et son costume du Dimanche.  Les clients du laboratoire ne cessaient d'entrer et sortir: la sonnette, sans doute, l'obsédait.
             Gêné,  il  demanda  un  autre  rendez-vous.  Le  jeune  homme  s'en foutait, pourtant Raymond lui trouva l'air moqueur.

           A Charlotte il dut expliquer qu'il n'était plus un adolescent, et que ... bref, elle entreprit de le rassurer, avec la fougue qu'elle réservait au quatorzième jour du cycle.  Pour la première fois, il eut toutes les peines du monde à la satisfaire.

Vinrent des jours bruyants, chauffés à blanc. Un carrossier, l'été, connaît l'enfer.

             Lorsqu'il retourna au laboratoire, le biologiste en chef l'attendait.  Affable, paternel, il le reçut dans son bureau, lui parla longuement, lui offrit même à boire. A la fin, il le conduisit dans une petite salle retirée, agréablement meublée, où diffusait une musique douce.  Raymond pouvait, insista-t-il, rester le temps qu'il voulait, il n'avait qu'à feuilleter quelques revues, se resservir à boire s'il le désirait, et appeler par interphone lorsqu'il en aurait terminé.
         Quand le biologiste fut parti, Raymond parcourut les revues pornographiques.  Sans naiveté particulière, le carrossier n'était pas pour autant adepte d'un érotisme à l'écorché.  Et la virilité triomphante des impétrants se contenta, contre toute attente, de le complexer un peu plus.
            Il dut une fois de plus rendre compte de l'échec de la mission.  La tâche, lui semblait-il, nécessitait la présence de sa femme.

           On allégua que la fragilité des sujets d'observation ne supporterait pas le transport, puisqu'il faudrait, hasard géographique, traverser toute la ville.

         Charlotte, dont la bonne volonté n'avait pas de limites, le rejoignit donc dans ce boudoir, où l'insolite de la situation, plus la motivation, émoustillèrent son imaginaire et son comportement.
          Las, cela ne suffit pas à vaincre une résistance devenue farouche.  L'oeil rond de l'éprouvette semblait le paralyser.  Raymond penaud alerta l'interphone en vaincu.
           Perplexes, le biologiste, Charlotte et  le gynécologue tinrent conseil.  Un psychologue fut consulté, lequel fort à propos pointa le doigt sur le caractère mécanique  du geste proposé.  Un psychiatre mit la main à la pâte, et abrutit Raymond de drogues psychotropes d'effets catastrophiques.

             In vivo comme in vitro, au lit comme au laboratoire, la semence de Raymond inéluctablement se raréfiait - le psychiatre disait " se refusait "-. Lui-même en tant que garagiste ne roulait plus des mécaniques: son entreprise s'en allait à vau-l'eau.

Charlotte ne reconnaissait plus Raymond !

        Un beau matin, il n'y tint plus: cette érection, physiologique mais parfaitement compétitive, serait l'aubaine qui lui permettrait d'en finir.  Il la veilla et l'entretint silencieusement, en cachette de Charlotte, jusqu'à l'heure d'ouverture du laboratoire.

On s'empressa de le conduire dans le petit salon.

           Raymond tenta le tout pour le tout.  A plusieurs reprises, l'organe donna des signes de faiblesse dont il ne tint pas compte, résolu coûte que coûte, en une seule fois, à laver les affronts. La clientèle en attente de prélèvements sanguins, surtout les enfants, s'inquiétèrent de soupirs, borborygmes, halètements, rugissements, lourds de mystères en cette heure matinale...
           Enfin, victoire et délivrance ! Tout juste s'il réintégra l'habit, avant de se ruer, ignorant le public, vers le jeune assistant:

- J'ai réussi !

Très digne le jeune homme avec une certaine froideur tenta de modérer son enthousiasme:

- Très bien, très bien, fit-il en l'apaisant, puis, recherchant l'aparté, donnez-moi l'éprouvette...

Et Raymond, sans cesser de sourire:

-  Quelle éprouvette ?



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